Publication de la "Société des Lecteurs de Francis Ponge"

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Gérard Macé. Extrait de Rome ou le firmament

Editions Fata Morgana, 1983, p. 77-78.

Mis en ligne le 6 novembre 2020, par Marie Frisson

Voir en ligne : Complément à « Francis Ponge », par Gérard Macé / Les Grands Lecteurs.

L’Aventin, Le Janicule, la Trinité des Monts et tant de terrasses où l’on revoit un passé plus vaste que le sien : de tous les balcons où la vue est à hauteur des toits, Rome apparaît comme une ville suspendue entre le clair et l’obscur, le ciel et les ruines, les enfers et l’au-delà - une ville étagée où le dorique et le corinthien soutiennent le baroque, et dans laquelle on ne cesse de changer de plan, ce que confirme la déambulation par autant d’escaliers que de rues ; mais quand on s’arrête en haut d’un belvédère, pour se taire ou recueillir des confidences destinées au vent (car la parole qui se fait amicale et plus libre est à l’abri de toute indiscrétion, et quasiment sans destinataire, à la fois intérieure et déliée), on cherche à s’orienter devant cette ville basse en mettant des noms sur les coupoles, montgolfières prêtes à s’enflammer dans l’air chauffé à banc - un peu comme à la nuit tombée on cherche sans y parvenir à nommer les étoiles, à reconnaître le bestiaire silencieux dont on a peuplé le zodiaque. Au point que dans l’atmosphère laiteuse et nacrée d’un brouillard de chaleur comme il y en a certains jours, on se trouve devant Rome comme devant l’univers irrégulier et clos de l’huître, telle du moins que la décrit Francis Ponge : « sous un firmament (à proprement parler) de nacre, les cieux d’en-dessus s’affaissent sur les cieux d’en-dessous ». Ce firmament à proprement parler renvoie certes à la voûte de cristal qui, dans l’astronomie ancienne, composait le huitième ciel et contenait les étoiles fixes, mais aussi, selon la Bible et Littré, à la cloison solide qui sépare les eaux supérieures des eaux inférieures : « Dieu dit aussi que le firmament soit fait au milieu des eaux, et qu’il sépare les eaux d’avec les eaux ».
De la Rome aérienne tout visiteur connaît les reflets de météore et les pluies torrentielles ; dans la Rome terrestre il peut mesurer presque à chaque pas, sur les pavés inégaux qui sonnent clair, combien le sous-sol est creusé ; (...)

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© Gérard Macé
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