SLFP - Francis Ponge Francis Ponge

Jean Paulhan

Jean Paulhan (1884-1968) est un écrivain, critique et éditeur français. Après une expérience traumatisante durant la Première Guerre mondiale, il sait se frayer un chemin dans le monde des lettres. Il est embauché en 1920 en tant que secrétaire à la N.R.F., revue publiée chez les Éditions Gallimard et dirigée par Jacques Rivière. À la mort de ce dernier en 1925, Paulhan devient rédacteur en chef de la revue et le reste jusqu’en 1940. Profondément hostile à la collaboration, il refuse de s’associer à Otto Abetz, ambassadeur d’Allemagne en France, et quitte la direction de la revue, remplacé par Pierre Drieu la Rochelle. Paulhan reprend la direction de la N.R.F. sous le titre de Nouvelle Nouvelle Revue Française en 1953, puis sous son titre initial à partir de 1959. Il restera à la direction de la N.R.F. jusqu’à sa mort en 1968. Pour ses travaux, Paulhan reçoit en 1945 le grand prix de Littérature de l’Académie française pour l’ensemble de son œuvre et est élu à l’Académie française en 1963.

Paulhan est une figure centrale du milieu de l’édition et de la littérature de la France du XXème siècle. Il dirige la collection « Une œuvre. Un portrait » chez Gallimard qui a pour but de promouvoir les nouveaux talents découverts par la revue. Les Douze Petits Écrits de Ponge y sont publiés en 1926. En outre, il crée et dirige la collection « Métamorphoses » où est publié Le Parti Pris des Choses en 1942, aux côtés des écrits d’Aragon, Picasso, Queneau, Breton ou Michaux. Il fait partie de nombreux comités de revues comme L’Esprit Nouveau, Résonances ou encore Spectateur. Il est également membre du jury de nombreux prix littéraires, parmi lesquels le Prix de la Pléiade, le Prix des Critiques, le Prix du Pen-Club ou celui de la Guilde du Livre. En outre, il entretient une correspondance abondante avec les grands noms de la littérature et de l’art français de son temps : Aragon, Artaud, Braque, Claudel, Éluard, Gide, Malraux, Ponge, Queneau, Sartre, Valéry, etc. Celle-ci est publiée chez Gallimard et chez les Éditions Claire Paulhan, maison d’édition de la petite-fille de Jean Paulhan. Grâce au travail de l’Observatoire de la vie littéraire (OBVIL) dans son projet « HyperPaulhan », la correspondance de Paulhan est accessible à tous en ligne.

La poétique de Paulhan va à l’encontre de la crise du langage que de nombreux écrivains voient apparaître durant l’entre-deux guerres. Dans Les Fleurs de Tarbes ou la Terreur dans les Lettres (1941), il oppose les « Terroristes », partisans de la Terreur, pour qui le langage est un obstacle à l’expression et les « Rhétoriqueurs », partisans de la Rhétorique, qui pensent qu’un travail sur le langage permettait encore l’expression d’une idée. Au cœur de la Rhétorique, Paulhan s’attache aux lieux communs, qui l’intéressent depuis son séjour à Madagascar de 1907 à 1910. Il y découvre les joutes oratoires malgaches, sortes de poèmes se terminant par un proverbe. Paulhan les traduira dans le recueil Les Hain-Tenys Merinas (1939). Selon Paulhan, le lieu commun et le proverbe ne sont pas de simples jeux s’attardant sur la forme et éclipsant l’idée mais ils permettent un accès direct à la pensée car le lecteur en saisit immédiatement le sens (Éric Trudel, La Terreur à l’œuvre, théorie, poétique et éthique chez Jean Paulhan, 2007). La poétique de Paulhan et sa vision du langage auront une grande influence sur Ponge et la formation de sa propre poétique.

Ponge rencontre Paulhan en 1923. Leur amitié, parfois orageuse, est déterminante pour Ponge. Paulhan, figure imminente de l’édition en France, lui fait publier ses premiers textes et corrige les poèmes que Ponge lui envoie. Ponge dédie de nombreux textes à Paulhan, dont Les Douze Petits Écrits, premier texte qu’il publie chez Gallimard en 1926. Paulhan contribue au choix et à l’ordonnancement des premiers recueils de Ponge : on peut suivre, dans la correspondance abondante que les deux écrivains ont eue, les avancements du projet de Sapates (1937), qui deviendra Le Parti Pris des Choses (1942). En 1945, Paulhan fait parvenir à Ponge une copie de son livre Braque, le patron, qui aura une grande influence sur les futurs écrits de Ponge. En 1946, Ponge rédige Pour une notice (sur Jean Paulhan) (1946 - mars 1957) où il raconte la carrière et la vision de la langue de Paulhan : « 1° la parole est primitive, antérieure à tout. 2° elle rend compte, elle contient le mystère, la contradiction, la non-identité, et résout les antinomies - du fait qu’elle est à la fois intérieure et extérieure. ». Il regrette, suite à la rédaction de cette notice, d’y avoir oublié de préciser que Paulhan était, selon lui, l’écrivain « le plus évidemment fait pour parler aux gens simples ».

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