Résumé
La tension entre singularité et appartenance peut caractériser l’ensemble de la trajectoire de Francis Ponge. Tension sans cesse recomposée, d’un bout à l’autre de son œuvre, et également de sa vie, entre le primat individuel et le primat collectif, entre désirs d’indépendance et compte tenu des autres. Qui sont ces « autres » ? Je n’ai voulu négliger aucun des faits interactifs qui font un écrivain et un auteur, qu’ils soient de nature institutionnelle, éditoriale, sociale, économique, politique, amicale ou familiale. Il s’agit également de voir comment Ponge se situe dans le temps long de la littérature (passée et à venir) et dans son histoire présente. Il y a la vie littéraire et ses acteurs ; il y a l’histoire des lettres et ses figures illustres, de Malherbe à Mallarmé ; enfin, il y a la république des lettres que Ponge aspire à fonder, toute son œuvre étant traversée par une réflexion sur le commun et sur le rôle social de la poésie. En adoptant une perspective diachronique, j’ai tendu à montrer que les stratégies d’écriture de Ponge ainsi que les modulations distinctes de sa voix à travers le temps sont intimement liées à sa place dans la communauté et à sa conception de la communauté qu’il estime être appelé à servir.